En psychodrame, il est question de jouer, représenter de façon scénique des fragments de son histoire, « Mettre sa vie en scène », titre le livre d’une psychodramatiste Greta Leutz, ou encore de jouer une histoire fictive, construction du groupe.
Rejouer des éléments de sa vie ne sera jamais copie conforme à ce qui a été vécu, de même que jouer des scènes projetées dans l’avenir ne correspondra pas pour autant à ce qui sera vécu.
C’est dans cet écart, ou dans cette possibilité de mettre du jeu dans une situation, élément de la réalité ou construction imaginaire, que se manifeste l’acte créateur des « psychodramatisants ».
Acte créateur, spontanéité créatrice, des concepts créés par Moreno l’inventeur du psychodrame.
Au-delà d’un acte de parole, le jeu mobilise le corps des acteurs, met en mouvement un récit qui par sa représentation scénique peut y apporter un autre regard, susciter de la surprise, de l’étonnement, de l’inattendu, ouvrir de nouvelles pistes. Encore faut-il y être suffisamment réceptif.
Le dispositif du psychodrame vise à créer ce climat de réceptivité par le cadre, la mise en train, le jeu, les échos du groupe.
Le cadre délimite l’espace et le temps : un lieu pour l’échange dans le groupe, un espace pour le jeu, la fréquence et la durée des séances.
Les règles, en cohérence avec le dispositif, sont des éléments du cadre et, entre autre, celle du jeu théâtral : « jouer en faisant comme si », ce qui n’est pas pour autant « faire semblant ».
La mise en train, ou « l’échauffement » correspond au début de séance pendant lequel les échanges de paroles au plus près de ce qui est là, présent, initie son rythme et crée sa tonalité. Déroulement d’un fil qui ne se révèle souvent qu’en fin de séance, part d’incertitude de l’acte créateur.
Et bien sûr, le jeu.
Sa mise en scène a déjà son potentiel de création et d’étonnement par la (re)constitution du lieu, des places, des mouvements, des présences ou absences d’un personnage…
Le « jouer » au sens de l’action en cours est sans doute le prototype de l’acte créateur en psychodrame, avec différentes techniques possibles dont le renversement de rôle, le doublage, la mise en perspective,… adjuvants au potentiel mobilisateur du jeu.
Les échos d’après jeu résonnent avec leur part de convergence et de divergence, ouvrent à de nouvelles associations des participants.
A l’instar du théâtre, la représentation scénique est sous le regard d’un public, des personnes qui cette fois n’ont pas été choisies pour jouer, ou n’ont pas désiré prendre part au jeu du groupe. La création d’un jeu n’est pas le fait du seul protagoniste mais également du dispositif, de la présence, voire de la co-construction des autres dans le groupe. Dans ce sens, le protagoniste n’est pas seul sur sa trajectoire ; son travail sur lui-même est intriqué et en résonance à celui du groupe.
Par contre, à la différence du théâtre, le scénario n’est écrit ni par le protagoniste, ni par le psychodramatiste, il ne s’agit pas d’interpréter l’œuvre d’un auteur dramaturge ou d’un expert en communication.