Le jeu de rôle sociodramatique peut être un moyen d’exploration de thématiques partagées par un groupe de personnes se réunissant pour un spectacle, un film, une exposé, un débat, un évènement social quelconque. L’intérêt c’est que les aspects plus affectifs, plus complexes, plus profonds du thème émergent et sont partagés, élaborés par le groupe. L’impact est plus puissant qu’un débat classique. Le jeu de rôle permet aux acteurs, sans se dévoiler, de se rendre compte à quel point ils peuvent être engagés dans la thématique abordée, ou un de ses aspects. Souvent cela touche des éléments de leur histoire personnelle. Le passage s’opère dès lors d’un collectif vers des singuliers.
Jeu de rôle, parce que les participants ne jouent pas des scènes de leur propre vie ; sociodramatique, parce qu’ils sont rassemblés à partir d’une thématique qui les intéresse, thématique qui fait partie des préoccupations d’un groupe social donné, voire de l’imaginaire collectif. Tous sont censés être concernés.
Lorsque les participants (25 au maximum) son rassemblés autour d’une thématique commune (l’amour, le désir, la sexualité, la violence sociale, le passage à adolescence, le bouc émissaire, l’injustice sociale, les discriminations,…), techniquement, il convient d’abord de permettre au groupe de s’échauffer, de se préparer au jeu, et à chaque participant de commencer à se mettre en scène dans un registre imaginaire en abandonnant les développements logiques. Les techniques les plus fréquemment utilisées ont recours à la métaphore, à la condensation, au langage poétique, à l’évocation, aux associations libres, voire aux dessins : c’est-à-dire qu’il convient de faire l’économie de la grammaire du langage raisonné pour rejoindre un imaginaire plus brut, plus grossier, moins personnalisé, plus collectif. Par exemple on demande au groupe, à chacun, de dire un mot, un seul, qui concerne la thématique. Soit ces mots sont rassemblés sur un tableau, soit ils sont écrits sur des papiers par terre, au centre du groupe. L’idéal, par la suite, est de susciter des articulations, des associations, des mots entre eux, donc des participants entre eux, et si possible aussi des déplacements corporels dans l’espace central, qui préparent les acteurs au jeu. On peut demander de « jouer » leurs associations de mots, ou des phrases en adressant l’une ou l’autre répartie, en interpellant, ou en associant divers papiers disponibles. On peut aussi demander à différents acteurs de s’interpeller. Cette phase peut durer un quart d’heure à vingt minutes et requiert pour finir une première évaluation, où les participants disent ce qu’ils pensent de ce qui vient de se passer. Une première esquisse du thème vient d’être faite, à gros traits. Ils s’expriment alors personnellement. Le plus souvent, déjà, l’un ou l’autre évoque en écho une situation, une scène, un souvenir qui s’associent au travail en cours.
C’est le moment pour l’animateur de saisir la balle au bond et de proposer un premier jeu. Le protagoniste ne joue pas son propre rôle ; soit il choisit quelqu’un au hasard, soit l’animateur demande qui veut jouer le rôle du protagoniste. Il est recommandé de demander régulièrement au groupe ce qu’il pense de l’évolution de l’exploration en cours et d’enchaîner des courtes scènes successives avec différents acteurs. Si on travaille avec des participants qu’on ne connaît pas du tout et qui n’ont aucune expérience du jeu de rôle, il est possible d’inviter le premier « protagoniste » d’être le metteur en scène d’une situation imaginée, jouée plusieurs fois par différents acteurs volontaires. L’avis du public est régulièrement sollicité.
Une deuxième séance est recommandée pour pousser plus loin l’exploration, tout en veillant à ce que personne ne s’engage trop dans son histoire personnelle. Souvent différentes facettes apparaissent et peuvent être explorées. A l’issue de l’expérience, on peut terminer comme on a commencé : grâce une technique rapide d’associations de mots, d’idées… qui clôturent l’exploration du thème.